Le Comité National de la Chasse et de la Faune Sauvage (CNCFS) s’est réuni en visioconférence ce mercredi 7 juillet afin de statuer sur six sujets :
– la retranscription juridique des accords sur les dégâts de grand gibier ;
– l’emploi de la chevrotine pour la chasse du sanglier dans les départements Corse et des Landes ;
– la reconduction des moratoires relatifs à la chasse de la barge à queue noire, du courlis cendré et de la tourterelle des bois ;
– l’abrogation des chasses traditionnelles ardennaises et du Sud-Est ;
– le report de la date de broyage et de fauchage des jachères agricoles ;
– la présentation du bilan « sécurité à la chasse » de l’année cynégétique 2022 – 2023.
Au préalable, le Président Schraen est revenu sur les difficultés de connexion récurrentes dans le cas des consultations publiques et en l’occurrence sur les ESOD.
S’agissant de la traduction des accords sur les dégâts de grand gibier :
Concernant les textes sur les dégâts de grand gibier et plus particulièrement du sanglier, le Ministère a rappelé la genèse des deux textes de modifications réglementaires présentés qui traduisent les deux accords signés avec le monde agricole et l’Etat le 1er mars 2023.
Avant de détailler les mesures, il a rappelé l’objectif commun fixé de réduction, au niveau national, des surfaces détruites par le sanglier d’au moins 20% en tendant vers 30% par rapport à la référence de la récolte 2019, année de début des échanges et du changement de loi.
La FNC et la Chambre d’Agriculture de France ont appuyé sur le fait que ces textes sont le résultat de nombreux échanges sur plusieurs années aussi bien avec le monde agricole que l’Etat pour trouver une issue équilibrée aux attentes des uns et des autres.
L’illustration des résultats de la récolte 2022 avec plus de 53 M€ d’indemnisations versées aux agriculteurs avec plusieurs départements très au-delà du million d’euros, n’a fait que renforcer la nécessité de disposer de plus d’outils pour la régulation du sanglier dans les zones qui le nécessitent.
Deux textes ont donc été modifiés pour traduire les accords. Il s’agit de l’arrêté de 1986 sur les procédés et moyens et la partie réglementaire du code de l’environnement (décret).
En premier lieu, dans cet arrêté, la nouvelle boîte à outil sanglier est instituée par des modifications au-delà des possibilités existantes dont le piégeage. Après publication, les fédérations départementales des chasseurs pourront choisir de mettre en œuvre telle ou telle mesure adaptée à leur contexte et lorsque nécessaire :
– extension de la période de chasse au sanglier au deux mois avril et mai sur autorisations et préférentiellement à l’approche ou affût (décret) ;
– usage de la chevrotine pour les départements « présentant des formations de forte densité végétale ou des secteurs à densité importante en matière d’infrastructures ou de constructions ne permettant pas toujours les tirs sécurisés par balle » (arrêté 1986), en clair maquis et zone péri-urbaine. Une enquête va être lancée pour connaitre de manière définitive quels sont les départements qui veulent bénéficier de cette possibilité sachant qu’un arrêté ministériel triennal instituera la liste des départements concernés ;
– tir autour des récoltes ou sur point d’appât, (arrêté de 1986), deux possibilités nouvelles données pour le sanglier par rapport à l’impossibilité précédente d’utilisation à la chasse d’engins à moteur et l’interdiction de chasse à l’agrainée.
– agrainage dissuasif encadré sur le plan national (décret) ; Le schéma départemental de gestion cynégétique fixe les conditions de recours à l’agrainage dissuasif conformément à l’article L. 425-5. L’agrainage dissuasif devra respecter les conditions suivantes (au plus tard au 1er juillet 2024) :
Un contrat d’engagement individuel entre la fédération départementale des chasseurs et la personne qui souhaite recourir à l’agrainage dissuasif ;
L’agrainage est linéaire et dispersé, sauf exception prévue par le schéma départemental de gestion cynégétique ;
La quantité maximale à distribuer ne peut pas dépasser 50 kg pour 100 hectares boisés par semaine ;
L’agrainage a lieu au plus deux jours fixes par semaine ;
L’agrainage est suspendu du 15 février au 31 mars sauf avis conforme de la CDCFS ; la notion d’avis conforme indiquant que le Préfet devra obligatoirement suivre cet avis de réduction ou de suppression de cette suspension.
En deuxième lieu, la procédure d’indemnisation est modifiée par le décret en recherchant la clarification-simplification de différents points :
– retour à un seuil (franchise) unique à 150€ par exploitation par campagne cynégétique ;
– procédures d’expertise précisées avec le délai des 8 jours ouvrés applicable que pour le définitif et plus pour les expertises provisoires ;
– ajustement de la procédure de remise en état avec indication dans la réglementation de la notion de période de travaux à respecter et de temps maximal de déclaration de travaux (8 jours) après réalisation de ceux-ci ;
– ajout d’une possibilité de contre-expertise de manière exceptionnelle dans les 48h après l’expertise avec l’estimateur missionné par la FDC
– impossibilité de poser un recours en CNI en cas de décision unanime en CDCFS FSDG ;
En troisième lieu, pour suivre la mise en œuvre des moyens et des résultats en matière de dégâts de gibier, la mise en œuvre de réunions de suivi (2 par an au minimum) aussi bien localement dans les départements qu’au niveau national est inscrite (décret) dans les missions de la CDCFS FSDG.
Dans l
’arrêté précité, le Ministère a souhaité, pour la forme, actualiser le terme « nuisible » en le replaçant par ESOD et modifier le 1er article qui évoque l’interdiction de la grenaille de plomb en zone humide en renvoyant vers l’instruction ministérielle détaillant la mise en œuvre du nouveau règlement européen en la matière.
Ces textes ont été votés favorablement avec un large consensus parmi les représentants des milieux cynégétique, agricole et forestier (18 voix pour, 3 voix contre et 2 abstentions). A noter que le représentant de l’ONF a voté pour ces textes et donc pour l’agrainage tel qu’il est défini…
Le Ministère a enfin indiqué respecter le souhait des acteurs de voir les deux textes publiés conjointement pour respecter les accords qui sont équilibrés, conservés dans leur ensemble. Ces textes doivent maintenant passer en consultation publique. Le décret devra être soumis au Conseil d’Etat décalant de quelques mois les publications. En parallèle une délégalisation partielle de la loi sur l’agrainage doit être demandée au Conseil Constitutionnel par le cabinet ministériel.
Ces mesures rentreront en action quand les textes seront publiés.
S’agissant de l’emploi de la chevrotine pour la chasse du sanglier en Corse et dans les Landes :
Malgré les poncifs habituels d’Yves Vérilhac sur la chasse du sanglier et la frilosité de quelques autres personnalités, l’emploi de la chevrotine pour la chasse du sanglier a recueilli un large consensus parmi les représentants des milieux cynégétiques et agricoles (17 voix pour, 3 voix contre et 2 abstentions).
S’agissant des moratoires :
Alors que les statuts de conservation de la barge à queue noire et du courlis cendré s’améliorent, les représentants de l’Etat continuent à reprendre en chœur la petite musique de l’écologie radicale et à faire comme si l’arrêt de la chasse constituait la seule et unique solution au rétablissement des populations d’oiseaux sauvages.
Le Président Schraen n’a pas maché ses mots pour dénoncer les aveuglements de cette gestion adaptative à sens unique (13 voix contre, 10 voix pour).
S’agissant de l’abrogation des chasses traditionnelles ardennaises et du Sud-Est :
Par une décision du 24 mai 2023, le Conseil d’État a annulé le refus implicite du ministre chargé de la chasse d’abroger les arrêtés-cadres relatifs à la chasse traditionnelle aux gluaux, aux lacs et aux filets et l’a enjoint d’abroger ces arrêtés-cadres dans un délai de deux mois à compter de la notification de sa décision. Le ministre de la Transition écologique n’avait d’autre choix que de proposer l’abrogation de ces textes. Preuve de l’incompréhension de cette politique jurisprudentielle inique, la majorité des membres du CNCFS s’est prononcée contre (13 voix contre, 9 voix pour et 1 abstention).
S’agissant du report de la date de broyage et de fauchage des jachères agricoles :
Cette année encore, le ministère de l’agriculture souhaite lever l’interdiction de broyage et de fauchage des jachères agricoles afin de faire face aux conséquences de la guerre en Ukraine. Malgré quelques inquiétudes, le Président Schraen, comme de nombreuses autres personnalités, a décidé de s’abstenir (11 abstentions, 6 voix contre, 6 voix pour) d’autant que la mesure s’applique à la récolte en cours.
S’agissant du bilan des accidents et incidents de chasse de la saison 2022 – 2023 :
Alors que la question de la sécurité à la chasse est omniprésente, l’Office français de la biodiversité a dévoilé aux membres du CNCFS un bilan des accidents et incidents de chasse traduisant le sérieux du réseau des fédérations de chasseurs. Malgré le quasi-doublement du nombre de balles tirées au cours de ces vingt dernières années, le nombre d’accidents de chasse continue de baisser : 78, dont 6 mortels. Malgré la pression de certains collectifs anti-chasse, le nombre d’incidents continue lui aussi à se réduire (84 incidents déclarés sur l’année). Ces bons chiffres doivent nous encourager à poursuivre nos efforts.
Etaient présents : les Présidents Willy SCHRAEN, Christian LAGALICE, Jean-Marc DELCASSO, Benoît CHEVRON, Jean-Pierre CAUJOLLE, André DOUARD, Dominique BUSSON, Daniel ROQUES, Eric de LAVENNE, Didier LEFEBVRE, ainsi que Nicolas RIVET, Matthieu SALVAUDON et Guillaume FIRMIN.